Levée provisoire de l’embargo du Bénin sur le pétrole nigérien: La crise partiellement résorbée

(La Chine désormais dans la phase délicate de sa médiation)…
La délégation chinoise arrivée à Cotonou, mardi dernier, dans le cadre de la résolution de la crise entre le Bénin et le Niger, qui a conduit les autorités béninoises à mettre l’embargo sur l’exportation du pétrole nigérien par la plateforme de Sèmè- Podji, a obtenu indéniablement un premier succès. Celui de faire fléchir provisoirement et de manière ponctuelle la position du Bénin. Mais la démarche de cette délégation ne pourrait être efficace que si la Chine poursuit sa médiation, en créant les conditions de retour au dialogue et la réouverture effective de la frontière du Niger avec le Bénin.
Nous indiquions dans notre édition d’hier que la place de la Chine dans ce projet pipeline Bénin-Niger constituait un atout majeur pour la résorption de la crise entre les deux pays aussi bien en ce qui concerne la gestion de l’exportation du pétrole nigérien par le Bénin que pour la résolution de la crise de manière globale. L’ami commun du Niger et du Bénin doit pouvoir réussir rapidement à installer un esprit de décrispation de la tension de part et d’autre. Il semble que nous ne sommes pas trompés dans cette approche de la résolution de la crise puisque un pas été franchi hier avec l’arrivée à Cotonou de cette délégation de hauts fonctionnaires venus des ministères chinois des affaires étrangères et des Mines.
Ce qui est en cause, en effet, ce n’est ni la nature du projet pipeline Bénin-Niger, encore moins sa mise en œuvre. Le Bénin n’a à aucun moment indiqué qu’il était lésé dans ce projet par les autres parties chinoise et nigérienne.
Elle ne remet pas en cause sa participation à cet important projet dans lequel il est prévu des droits fiscaux et de transit . « Le Bénin n’a aucune intention de nuire aux intérêts de l’Etat du Niger , ni à celui de notre partenaire commun (la Chine) » , a déclaré le ministre des Mines et de l’Energie , Samou Séidou Adambi lors de la conférence conjointe qu’il a donnée avec le représentant de la délégation chinoise. « Nous avons décidé d’autoriser le chargement du premier navire qui mouille dans nos eaux », a-t-il ajouté.
La partie béninoise ne fait aucune revendication directement liée à la mise en œuvre de ce projet dans lequel le Bénin attend également beaucoup d’argent.
La revendication béninoise est claire
La revendication des autorités béninoises porte sur un « caprice » de son voisin nigérien qui garde fermée sa frontière avec le Bénin, depuis des mois, pour le « punir » d’avoir fermé les siennes en exécution de sanctions de la Cédeao pour changement anti-constitutionnel de régime politique. Du fait de la fermeture de cette frontière par le Niger , le Bénin subit naturellement de lourds préjudices, notamment financiers, parce que tout échange formel entre les deux pays n’est plus possible. Et il n’est pas normal que les autorités nigériennes empêchent le Bénin de gagner de l’argent alors qu’elles profitent du sol du Bénin pour engranger des milliards de F.cfa , chaque jour, via le projet pipeline.
Dans ce cadre, Patrice Talon a bien relevé qu’il était disposé à lever sans délai l’embargo sur l’embarquement du pétrole nigérien si les autorités nigériennes décident de rouvrir leurs frontières avec son pays. Dans ces conditions, on pourrait logiquement imaginer, qu’en levant provisoirement et ponctuellement cet embargo, les autorités béninoises ont reçu des promesses fermes de la partie chinoise de s’impliquer activement dans la résolution de cette crise. Il est probable que le Bénin ait reçu des garanties de la Chine de jouer à fond sa médiation pour le dégel de cette crise politique entre les deux pays. Il est possible ainsi d’entrevoir une forte implication de la Chine pour éviter que le problème du maintien de la fermeture du Niger avec le Bénin , soit une véritable entrave pour la mise en œuvre du projet pipeline dans lequel ils ont investi des milliards de dollars.
Le Bénin a déjà montré jusqu’où il peut aller pour faire fléchir la position des militaires au pouvoir au Niger. Il a suffisamment alerté l’opinion internationale sur l’injustice qu’il subit, depuis des mois, du fait de la non réouverture de cette frontière. La partie chinoise sait désormais à quoi s’en tenir pour contribuer au règlement définitif afin de mettre ses lourds investissements, dans ce gigantesque projet, à l’abri de toute perturbation et de tout danger. Amie des deux pays, elle a les moyens diplomatiques de contribuer à la résolution définitive de cette crise. Sa médiation doit donc aller plus loin que celle qu’elle a commencé hier sur la terre béninoise. Entre-temps elle devrait aussi donner de synergie à ses efforts pour amener l’autre ami nigérien à mettre de l’eau dans son vin pour créer un environnement propice à l’accalmie et à la discussion franche.